Rue Robert Houdin, Paris 11éme Arrondissement.
Ecrit par Jess Zimmerman :
Michael de Feo se sent aussi à l’aise en cherchant les ennuis avec la police d’Amsterdam qu’en critiquant le jargon du monde de l’art. Cet artiste à multiples facettes – travaillant moitié dans la rue, moitié pour des galeries – parvient à rester sur la fine ligne de démarcation entre le prétentieux monde de l’art et le moins affecté monde de la rue.
De Feo vient à Paris avec une mission qu’il a répétée de très nombreuses fois auparavant : peindre des fleurs. Ce n’est pas vraiment surprenant pour un artiste qui travaille sous le pseudonyme “The Flower Guy”, et ce depuis vingt-deux ans.
Cela doit-il imposer le respect ou devrions-nous nous interroger sur sa santé mentale ? La vraie question est plutôt : voir ses fleurs devenues une icône lui donne-t-il envie de les jeter ? Bah voyons ! Ce new-yorkais reste fidèle à la plante qui l’a rendu célèbre.
De Feo à rue Robert Houdin, Paris 11éme Arrondissement.
Avec de légères modifications qui apportent clairement un soulagement à ce fanatique des fleurs dans son infini cycle de reproduction, De Feo crée ses oeuvres avec un sens quasi-obsessionnel du détail. Et malgré cet aspect névrosé, c’est indéniablement prolifique et cela attire le regard.
Il a beau avoir gagné sa crédibilité en tant qu’un typiquement pauvre étudiant d’art récupérant du papier des poubelles sur la 17è et Broadway, cet artiste a trouvé une nouvelle voie confortable – une qui se divise bizarrement entre les galeries et la rue, et qui met à jour plus d’un paradoxe dans un voyage orageux passé à créer des oeuvres à Paris.
L’art de De Feo va de l’illégal au commercial, faisant de lui à la fois un mauvais garçon et le rêve de tout propriétaire de galerie. Ce n’est pas nouveau que le monde de l’art aime garder à l’oeil ce qui est “chaud et à la mode”, et New York peut se vanter d’avoir la première amené le street art dans les galeries dans les années 70. Mais De Feo a-t-il pour autant perdu de vue la nature rebelle et la guerrilla mystique à l’origine de ce mouvement ?
Il chevauche en effet une fine ligne, passant d’un rôle à l’autre. Il dit lui-même retenir un penchant inné pour “secouer le status quo, faire quelque chose qui ne devrait peut-être pas être fait ou qui n’est pas attendu, ou qui d’une certaine façon violente quelque chose”, mais ses converses blanches flambant neuves semble révéler quelque chose d’autre.
C’est une chose de parler, c’en est une autre d’agir, et même si De Feo se lève comme tous les adorés hors-la-lois, écrivains et artistes, ses vêtements, ses pointilleuses préférences en terme de peinture, et sa facilité notable à être vu du public, peuvent, ou non, l’avoir placé dans un autre camp.
The Flower Guy ensures he gets the perfect shade at rue Robert Houdin.
Michael De Feo à Rue Juliette-
‘Bloemen (A bedtime story)’, 2014, 53.5 x 40 inches – acrylique et spraypaint et les cartes sur la toile. Nouveau travail par Michael De Feo pour sa exposition à Rush Arts Gallery, New York, ‘Pocket Full of Posies’‘.
Michael De Feo à l’exposition, ‘Pocket Full of Posies’ à Rush Arts Gallery.
Sans porter de jugement (trouvez-moi un artiste sans excentricités, ou qui maintient une ferme distance avec la commercialisation), De Feo incarne les contradictions de le street art aujourd’hui. Les graffitis sont-ils devenus des marchandises dans les galeries ? Est ce que cela lui enlève de la valeur ? Comment un mouvement au départ illégal change-t-il lorqu’il reçoit la reconnaissance de la société et est perçu comme un enrichissement culturel ?
C’est une zone grise sans réponses claires, et il y a beaucoup d’opinions différentes. Mais au final, De Feo, à la fois célébré dans les galeries et extraordinaire peintre floral, n’a pas totalement perdu de vue sa première motivation :
“La valeur intrinsèque n’est pas ce qui se passe quand vous rencontrez l’oeuvre, mais ce qui se passe après. Cela ouvre vos yeux, vous fait remarquer ce qu’il y a autour de vous. Quand vous serez sur votre trajet habituel, vous aurez peut-être moins d’oeillères. Peut-être que vous ne regardez pas le street art, que vous regardez n’importe quoi d’autre dans votre environnement immédiat, mais quoi qu’il en soit, les choses deviennent plus engagées”.
Michael De Feo, collage, New York.
The Flower Guy arrive à San Pedro, Belize.
Children Museum of the Arts à New York.
Michael De Feo collage, Buenos Aires.
Fleur collée juxtaposé à de vraies fleurs, New York.
Graffiti, Greenwich, Connecticut.
11 Spring Street in New York City.
Michael De Feo, canaux de Venise.
Homage au jour de pluie à Paris Caillbotte, Tarascon-de-Provence.
Michael De Feo tient un sticker de son iconique fleur. Photo par Joe Russo.
Une fleur collée dans son habitat naturel, Turks and Caicos.
———-
Pour écouter l’interview de Michael De Feo par Underground Paris sur Radio Marais, c’est ici.
———-
Pour le site de MDF, c’est ici.
Pour l’Instagram de MDF, c’est ici.